boichotMetteur en scène globe-trotter, Barbara Boichot est installée avec la Compagnie Déviation à l’Abbaye de Corbigny, dans la Nièvre depuis 2004. On ne compte plus les comédiens qu’elle a formés un peu partout ou qui, étant juste venus lui demander conseil un jour, n’ont eu de cesse de la revoir.

La maison de la culture de Varennes-Vauzelles, cité cheminote des faubourgs de Nevers, un vendredi en début de soirée. Une dame brune à lunettes discute des derniers détails avec quatre jazzmen. Autour d’elle, quelques personnes s’affairent. Les amis et les afficionados commencent à arriver. Les musiciens partent en coulisse se préparer à montrer à un public de connaisseurs ce que leur a apporté une semaine de résidence sous la houlette de Barbara Boichot, celle-là même qui vient de leur prodiguer les ultimes encouragements.

Jaster, c’est le nom de la formation qui se produit, est typique des groupes ou des artistes atypiques qui sont venus ces dernières années chercher à Corbigny, aux portes du Morvan, une autre façon de se dévoiler au public, d’être un autre eux-mêmes. Pendant les quelques minutes qui précèdent le récital, Barbara Boichot, raconte sa méthode, affinée au long des années et des rencontres qu’elle a pu faire à travers le monde, de Villers-le-Bel dans le Val d’Oise, à San Luis du Potosi au Mexique, en passant par les camps de réfugiés Bosniaques dans les Balkans en guerre. « Je dirige des gens qui ont des langages que je ne parle pas et par le jeu de la scène, il faut que tout le monde arrive à se comprendre. Si moi je comprends, tout le monde comprend aussi » Dit comme cela, ça paraît simple, en réalité il y a 20 ans de pratique derrière cette explication toute naturelle.

Ressentir la mise en scène

Cette façon de faire, Barbara Boichot l’a pour ainsi dire découverte en intervenant au profit d’enfants issus des quartiers difficiles. « Mettre en scène ces enfants-là, c’est différent d’avec les bons élèves qu’on peut plus facilement diriger. En fait il faut leur poser la question: de quoi vous voulez parler ? Ce sont eux qui vont en quelque sorte proposer leurs idées. La difficulté est dans la gestion humaine, le travail avec les gens est plus difficile que le montage final. » Ressentir la mise en scène, décrire ce qu’on fait, c’est un peu la recette miracle de Barbara et la raison pour laquelle on se déplace pour apprendre à occuper une scène. Mais ce n’est pas un oracle ou un gourou qu’on vient consulter et qui délivre ses sentences, car c’est elle qui a la démarche d’aller vers les gens. Les multiples interventions de cette grande voyageuse parlent pour elle et le groupe qui va jouer estime que le travail mené à Corbigny est comparable à l’apprentissage d’un instrument de musique. Une musique élitiste comme le jazz, musique que Barbara ne pratique pas, se met en scène. Comme elle l’explique, « La musique se regarde aussi » et on peut jouer avec un public qui apprécie ce changement psychologique. Cela aura été la plus-value apportée par le savoir-faire de Barbara Boichot.