Depuis pas mal d’années maintenant l’industrie des jeux vidéo est un élément incontournable de nos loisirs. Sa sophistication croissante tend à la pousser à devenir un média culturel mais également à être envisagé comme un débouché possible pour nombre de professionnels du spectacle.

En mai dernier une météorite géante s’est abattue avec fracas dans le monde du jeu vidéo. Cet aérolithe a pour nom L.A. Noire, un jeu où l’on se met dans la peau d’un détective de la police de la « Cité des Anges » des années 1940.

Et puis le motion scan est arrivé…

Il existait déjà la motion capture, ce procédé qui permet de capter les mouvements d’un élément réel pour les placer dans un environnement virtuel. « L.A. Noire » use abondamment de cette technique pour donner plus de vie à ses personnages, mais surtout pousse le réalisme encore plus loin à l’aide du motion scan. Ce que le motion scan accomplit, c’est de scanner et modéliser directement la tête d’un acteur, de conserver la performance en l’état. Cette technique permet d’enregistrer la voix des comédiens en direct afin de s’éviter tout mauvais doublage qui nuirait à l’un des points clé du jeu, la véracité des réactions des témoins lors des interrogatoires. Les acteurs dont le visage a été scanné sous tous les angles ne sont pas non plus de parfaits inconnus, mais des acteurs de séries connues. Le rôle du héros, le détective Cole Phelps, est tenu par Aaron Staton, alias Ken Cosgrove dans Mad Men. Des comédiens de Fringe, Heroes ou encore Les Experts participent aussi au casting.

Pendant ce temps en France

Un jeu ne se double pas comme un film, comme l’explique Cécile Irlinger, responsable développement et localisation jeu vidéo à La Marque Rose (1), leader français dans le domaine du doublage des jeux : « Dans le jeu vidéo, on travaille un peu à l’aveugle on ne reçoit que peu d’images du jeu et des infos sur le contexte par morceaux avec quelques répliques en anglais, au rythme du développement du jeu. » «Travailler sans bande rythme et imaginer la situation avec l’aide du directeur artistique et de ce qu’ils entendent en anglais », voilà ce qui attend un comédien tentant l’aventure. La raison en est simple, les jeux vidéo sortent en simultané dans le monde contrairement aux films et la crainte du piratage pousse les développeurs à vouloir faire tout en même temps, à charge pour les doubleurs de se débrouiller avec ce qu’on leur donne.

Tous les développeurs de jeux ne tiennent pas d’ailleurs à un doublage, une localisation dans le jargon, de leurs produits. Le jeu en V.O avec sous-titres a tendance à sonner plus authentique chez certains joueurs. Mais, comme le souligne Cécile Irlinger « si contrairement aux jeux d’enfants, tous en français, le jeu destiné à un public adulte a plus tendance à se partager entre V.O. et V.F., le public français a besoin de plus de localisation par rapport à d’autres publics comme en Europe du nord. » et d’autre part, « Des développeurs tiennent à se positionner sur les marchés locaux et avoir une audio de qualité. »

Ce que doit être un bon comédien de jeux vidéo

Un bon comédien de jeu vidéo, c’est déjà un bon doubleur. « L’essentiel des doublages sont faits par des comédiens de doublage cinéma et télé. Cependant certains comédiens commencent par le jeu vidéo et l’animation pour ensuite aller vers le cinéma. ». Connaître l’univers des jeux vidéo est forcément un plus pour mieux connaître les différentes intonations et enchaîner les types de répliques. Il n’existe pas encore de comédiens spécialisés dans les types de jeu et ceux-ci ont le choix, notamment l’été, puisque entre juin et octobre les jeux vidéos sortent les uns après les autres pour être sur les présentoirs avant Noël. « C’est un challenge pour nous de trouver des comédiens sur Paris en août car la plupart sont en vacances et nous sommes en pic de production », avoue Cécile Irlinger. Certains acteurs connus se sont prêtés au jeu comme Emma de Caunes ou Vincent Cassel. Si un jeu de la qualité de L.A Noire n’est pas encore prévu prochainement par des développeurs français de jeu vidéo, notamment à cause du coût du motion scan et de la motion capture, l’idée fait son chemin et le doublage aura besoin des comédiens francophones les plus talentueux.

 

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