A l’heure où le combat pour l’ « exception culturelle » est loin d’être gagné, voilà qu’une de nos plus éminentes  ambassadrices  de la danse est sommée de mettre la clé sous la porte.

La mairie de Bagnolet se trouve confrontée à un grave problème en effet. Virer la compagnie de danse fondée par la danseuse Etoile pour faire de la place aux enfants de l’école d’à côté qui sont à l’étroit, ou bien se faire taper sur les doigts par les parents d’élèves, peu sensibles apparemment à cette offre artistique exceptionnelle  mise à la portée des habitants de la ville de  Seine-Saint-Denis. Une polémique se développe même contre Marie-Claude Pietragalla, accusée de profiter d’une situation de privilégiée. Ce à quoi elle répond avec pertinence : « Nous sommes tous collectivement engagés dans un processus où la place des artistes dans la cité n’est jamais acquise. Je demande donc aux pouvoirs publics de prendre leurs responsabilités et de permettre non seulement aux enfants de bénéficier d’une école digne de ce nom mais également à une entreprise culturelle de vivre à Bagnolet en Seine-Saint-Denis».

En effet, est ce que les pouvoirs publics ont conscience que si nos enfants ont besoin d’apprendre à lire écrire et compter, ce qui  du reste n’est pas toujours bien le cas dans toutes les écoles, ils ont besoin aussi de développer leur sens artistique ? Ce que l’école leur donne encore moins souvent. La chance de bénéficier de la présence d’une entreprise culturelle conduite par une femme dont le talent est unanimement reconnu, ne saute aux yeux de personne ?

Si madame Pietragalla, la grande danseuse qui fait la fierté de notre pays, a elle-même autant de difficulté à s’implanter dans une commune de la couronne parisienne, on imagine comment sont traités les anonymes parfois très talentueux, mais ne possédant pas la célébrité, désireux de faire partager au plus grand nombre leur passion artistique.

Voilà ce que vivent de nombreux artistes, une situation dont le ridicule tragique  témoigne d’une tendance au suicide culturel de notre pays. Les DRAC ne s’intéressant qu’aux grands temples de la culture officielle érigés par l’état, CDN, CAC…qui ont aussi leur utilité, et regardant avec méfiance toutes initiatives qui sortent de ce champ balisé.

Voilà encore un dossier que devrait ouvrir notre ministre de la culture, mais qui concerne aussi les élus des collectivités territoriales.