Il suffit de faire un tour sur les blogs et forums consacrés à cette question épineuse pour le vérifier : Les « petits » auteurs de musique se plaignent de ne quasiment rien toucher de la Sacem, à tel point que certains renoncent à s’y inscrire. Pourtant, comme le montre le dernier rapport annuel de la Commission permanente de contrôle des sociétés de perception et de répartition des droits, la manne financière que cette société perçoit en leur nom — 755,8 millions d’euros en 2008 — n’est pas perdue pour tout le monde.

« La rémunération de l’encadrement supérieur des sociétés de perception et de répartition des droits mérite attention de la part des ayants droit, tant au regard de la responsabilité incombant à ces dirigeants dans la bonne conduite et la modernisation de la gestion collective qu’en considération du fait que la charge s’en impute, en dernière analyse, sur le montant des ressources collectées. », rappellent les auteurs du rapport. Pourtant, ajoutent-ils, les dispositions du Code de la Propriété Intellectuelle (CPI) ne garantissent « sur cette question sensible qu’une transparence très mesurée ».

Derrière les euphémismes apparait une réalité crue : les dirigeants de la Sacem * s’en mettent plein les fouilles, en toute opacité.

Cette situation est d’autant plus choquante que depuis le milieu de la dernière décennie, la somme des perceptions des droits n’a cessé de décroître : elle enregistre une baisse de 2,3%, en valeur réelle, sur la période 2004-2008.

Notes de frais somptuaires et avantages en nature

En regard, la rémunération moyenne des cinq plus gros salaires de la SACEM (363 908 euros brut en 2008) a augmenté de 9,1 % entre 2005 et 2008 !

orchestre

Le montant exact de la rémunération du président du directoire de la Sacem, Bernard Miyet, n’est pas précisé dans le rapport, mais il est possible de s’en faire une idée, puisqu’il est indiqué que son salaire est supérieur de 165 % à celle du patron de la SCPP, Marc Guez, qui perçoit pour sa part entre 250 000 et 300 000 euros par an. Le salaire brut annuel de Miyet est donc compris entre 412 000 et 495 000 euros.

S’y ajoutent de très confortables avantages ses notes de frais se sont élevés en 2008 à plus de 29 000 euros. Elles sont payées sur deux cartes bancaires société comme en disposent une dizaine de dirigeants, qui s’en sont servi pour payer quelque 134 000 euros de frais en 2008. « L’examen des dépenses correspondant à l’utilisation de ces cartes en 2007 et 2008 ne permet pas de nette en relation l’intégralité des dépenses avec (…) des frais de mission et de réception », notent les rapporteurs, qui mentionnent au moins un cas de fraude avérée en 2007. La Commission observe qu’en outre, de nombreuses dépenses (voyages, réservations d’hôtels, notes de restaurant, etc.) sont payées directement par la société…

Sept dirigeants salariés bénéficient de surcroît d’un véhicule de fonction, dont la Sacem paie la location, les frais d’entretien, d’assurance, de carburant, de péages. etc., pour un total de prés de 172 000 euros en 2008.

Ces rémunérations et avantages fastueux sont essentiellement alimentés par des placements réalisés avec des fonds, collectés au titre des droits des artistes, qui ne sont pas distribués en fin d’année. Ce sont donc les sociétaires qui, finalement, les paient Or, combien d’entre eux bénéficient-ils d’une rémunération annuelle supérieure à 400 000 euros ?

La Commission permanente cite un autre rapport sur les sociétés de gestion collective, élaboré par l’Inspection générale de l’administration des affaires culturelles en février 2000. Ses auteurs jugeaient nécessaire d’accroître l’étendue des pouvoirs des associés â l’égard de ces sociétés. Il serait temps.

* Et pas seulement : le rapport met en cause l’ensemble des sociétés de perception des droits et le président de la SPP, compte tenu de la petite taille de sa société, ne se montre guère moins gourmand.