Une société, aussi bien édifiée soit-elle, doit laisser s’exprimer une part de rêve. Nous dirions même que cette part de rêve est essentielle à la construction de toute société humaine. Alors oui, notre métier, celui des gens du spectacle, est de rêver et de faire rêver.

Mais nous ne sommes pas des marchands de rêves, pratiques et à crédit. Nos rêves se vivent autrement que dans l’éphémère immédiat. Qui n’a passé des mois à concevoir un spectacle, de la première ébauche jusqu’au lever de rideau, en passant par les répétitions, ne sait ce que cette aventure collective suppose de labeur acharné, d’ajustements, d’empoignades, de transpiration, de rires et de larmes…

Monter une pièce de théâtre, lancer sur la piste d’un cirque un spectacle féerique, organiser un concert, réaliser un film nécessite beaucoup de temps et d’engagement. En cette période des festivals, rappelons par ailleurs que pour répondre aux attentes d’un public de plus en plus exigeant, techniciens et artistes doivent sans cesse se former, chercher, apprendre et découvrir.

Voilà ce que nous coûtent et nous rapportent nos rêves. Voilà ce que nous coûte cette part volontiers apportée à la société humaine. Et nous y tenons, personne ne nous l’enlèvera.

Au-delà du statut social, défini par le Pôle Emploi, sous le poétique vocable d’intermittent du spectacle… (ça, parbleu, c’est une reconnaissance !), nous sommes conscients d’être une richesse qui dépasse la dimension économique.

Laissez-nous rêver nos métiers et vivre notre passion. C’est ce qui fait la richesse de notre beau pays, de notre société humaine, de notre civilisation.