Certains puristes diront que la véritable musique traditionnelle ne sonne plus en Bretagne depuis le début de la seconde guerre mondiale, la société n’étant plus traditionnelle. Malgré tout, un esprit persiste et si les sonorités ont bien changé, aux quatre coins de la Bretagne, on rend hommage à la culture celtique avec chants, danses, binious et bombardes.

D’aucuns préféreront parler plus généralement de musique bretonne qui, en dépit des nombreuses influences étrangères qu’elle a subies, a gardé sa propre personnalité. La question de l’essence n’est pas anodine car le premier problème que le genre rencontre est celui de son image. Selon certains professionnels du milieu, cet te musique, qui devrait être considérée comme un genre à part entière

à l’instar du jazz, est victime de préjugés. L’un d’eux porte sur la qualité. Il est vrai que, en Bretagne, la musique est le plaisir de nombreux amateurs que les programmateurs auraient tendance à déconsidérer, phénomène peut-être dû à la mentalité élitiste franco-française.

Heurs et malheurs du fest-noz

Le fest-noz est l’expression naturelle et populaire de cette musique. Or, on observe une certaine perte d’intérêt pour cette manifestation, en dehors des cas d’instrumentalisation sociale, politique ou idéologique. Néanmoins, il demeure des festoù-noz spécifiquement dédiés à la culture celtique où l’on s’évertue à redonner vie à une tradition. Mais ce n’est qu’un sentiment car il n’existe à l’heure actuelle aucun observatoire économique et statistique de la musique bretonne. Si le site tamm-kreiz.com recense les festoù-noz, il n’existe aucun chiffre permettant d’évaluer une tendance soit au regain soit, plus certainement, à l’accalmie. En revanche le sentiment inverse se rencontre concernant le nombre de musiciens. Il semblerait que la formation ne soit pas en reste et de nombreux conservatoires proposent l’enseignement de la musique bretonne. Le problème viendrait plutôt de l’offre de représentations. Y a-t-il moins de représentations parce que le public s’en désintéresse ou le public s’en désintéresse-t-il parce qu’il y a de moins en moins de représentations ? L’œuf et la poule… Le fest-noz n’est pour autant pas en péril et l’association Dastum, soutenue par le conseil ré­gional, travaille d’arrache-pied pour faire inscrire au patrimoine immaté­riel de l’Unesco le fest-noz et « les chants à écouter en Bretagne ».

De nouvelles contraintes

Outre le problème de son image, la musique bretonne semble avoir subi les foudres de la réforme du statut d’intermittent du spectacle. Certes ce problème n’est pas réservé à la musique bretonne mais les «ni­ches» sont toujours plus sensibles au changement. Ce statut imposerait de nombreuses contraintes admi­nistratives et juridiques écrasantes pour les professionnels, sans parler du paradoxe que l’intermittent n’est autre qu’un chômeur. Mais la musi­que bretonne reste une réalité bien vivante d’autant que d’un point de vue artistique elle repose sur un patri­moine commun, que en principe, tout le monde peut reprendre sans avoir à payer de droits d’auteur. Pour les organisateurs, cela implique d’être vigilant lors des déclarations à la Sa­cem en mentionnant bien qu’il s’agit de titres traditionnels.

En définitive, il existe indubitable­ment un marché vivant mais qui manque cruellement de structure. Heureusement, le Conseil régional et diverses associations telles Dastum ont récemment lancé un groupe de travail en vue d’un diagnostic précis. A suivre…