Lorsqu’elle est publiée au Journal Officiel, l’ordonnance du 13 octobre 1945 peut apparaître comme un immense progrès. On en a fini avec la censure et les artistes semblent bénéficier d’une vraie protection. Soixante-cinq ans plus tard, c’est encore cette même ordonnance qui encadre le spectacle vivant… pour le meilleur, mais aussi pour le pire. Car celui-ci a bien évolué depuis 1945.

Sans parler des conceptions artistiques, les lieux ont changé, mais aussi les techniques, et finalement les métiers. Le travail d’un éclairagiste est aujourd’hui profondément différent de ce qu’il était dans l’immédiat après-guerre, et l’on ne parlera pas des ingénieurs du son au service d’une technique en perpétuel bouleversement (voir aussi pages 9-10). Les mentalités aussi ont changé. L’espèce de mépris affectueux qui entourait les « théâtreux » et les ouvriers de la scène depuis des siècles s’est évanoui, de même que la frontière qui séparait artistes « nobles » (sociétaires de la Comédie Française ou chanteurs de l’Opéra) des « saltimbanques » ou des « machinos ». Aujourd’hui tous refusent ce qui peut paraître une aumône ou un assistanat condescendant.

Marquée par son époque, l’ordonnance de 1945 joue-t-elle encore son rôle protecteur ? On peut en douter. En dépit des différents toilettages et des tentatives de rénovation, le vieux dispositif est grippé. De plus, la raréfaction de l’argent public, qui soutient le spectacle vivant depuis des siècles, fait peser de lourdes menaces.

C’est pour répondre a ces défis que nous vous proposons ces témoignages qui sont aussi des pistes de réflexion.

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