Le « leader » d’une formation de musiciens invite un guitariste à rejoindre son groupe à l’occasion d’un concert. Sa prestation lui plait. Il est admis au sein du groupe et la collaboration se poursuit pendant de nombreuses années jusqu’à ce que leurs relations se dégradent. Le leader adresse à chaque membre du groupe un courrier électronique par lequel il les informe qu’il entame la constitution d’une nouvelle équipe et qu’il ne manquerait pas de rappeler ceux d’entre eux qu’il désirerait associer à son travail.

N’ayant pas été rappelé et estimant ainsi qu’il y avait eu rupture de contrat de la part du leader, le guitariste a saisi la juridiction prud’homale. Selon le conseil des prud’hommes puis la Cour d’appel, le guitariste n’établissait pas que le leader exerçait sur lui un pouvoir de direction et de contrôle et qu’au contraire, il ressortait de divers témoignages que le guitariste était libre dans sa prestation d’artiste et dans l’organisation de son activité, dès lors notamment qu’il pouvait s’absenter sans encourir de rappel à l’ordre.

Le leader n’étant pas l’employeur, cette qualité pouvait-elle être reconnue au groupe ? La Cour d’Appel répond par la négative en relevant : que le groupe est une entité artistique qui ne poursuit pas d’activité économique propre, qu’en effet cet ensemble de chanteurs et de musiciens est en lui-même dépourvu de la personnalité juridique, d’un patrimoine et de revenus propres, de sorte que leur seule dénomination ne recouvre pas les éléments corporels ou incorporels permettant la poursuite autonome d’une activité de production musicale ; que dès lors le groupe ne constitue pas en tant que tel une entreprise économique dont le leader aurait été le dirigeant.

S’agissait-il, comme le guitariste le prétendait également, de l’éditeur musical, auquel il reprochait d’avoir opéré des retenues sur sa rémunération ? La Cour écarte encore cette prétention au motif que « la profession d’éditeur musical ne se confond pas avec celle d’entrepreneur de spectacles ».

En définitive, plus prosaïquement et en dépit des efforts du guitariste pour impliquer son leader, le groupe ou son éditeur musical dans son procès, la justice ne lui reconnaît, pour employeurs, que les différents organisateurs des spectacles dans le cadre desquels il s’était produit avec la formation à laquelle il appartenait.