Entre abus et augmentation abusive, la Caisse des Congés Spectacles voit son fonctionnement remis en cause ? Quel avenir pour la vieille dame de la rue du Helder ?

Depuis le 1er avril 2012, la cotisation à la Caisse des Congés Spectacles a augmenté de 0,5% pour passer de 14,7% à 15,2%. Pour l’exercice 2012, c’est-à-dire pour les activités comprises entre le 1er avril 2012 et le 31 mars 2013. La Caisse des Congés Spectacles explique en effet que cette hausse « résulte de l’amélioration du taux de paiement de l’indemnité de congés payés aux bénéficiaires et du faible rendement des placements financiers ».

Ces motifs ont de quoi surprendre. Ainsi, la Caisse des Congés Spectacles deviendrait plus chère parce qu’elle remplirait mieux sa mission et parce que la Bourse rapporterait moins. On comprend que de tels propos aient provoqué un tollé chez les artistes et leurs employeurs directs, compagnies ou théâtres. On le comprend d’autant mieux lorsqu’on apprend que, pour son exercice 2011, la Caisse a avoué un bénéfice net de… 5.821.000 €, lesquels ne sont visiblement pas allés dans la poche des artistes.

Bien sûr, il faut garder la tête froide. Après tout, toutes les mutuelles et les compagnies d’assurance, sans parler des autres caisses, effectuent des placements financiers. Doit-on pour autant faire payer aux cotisants l’incompétence ou la naïveté de quelques uns ?

« On n’a plus confiance » avoue, écœurée, la fondatrice de cette petite troupe d’animation médiévale. « C’est toujours à nous, les petites compagnies, que l’on demande de se serrer la ceinture. En plus, les Congés Spectacles touchent des cotisations pour des artistes qui ne leur demanderont jamais rien. Souvent je fais appel à des musiciens qui exercent une activité salariée en dehors de leur activité artistique. Ils cotisent aux Congés mais ils n’auront jamais l’idée de demander leur dû : c’est trop long et trop compliqué pour quatre ou cinq prestations par an. Le plus souvent, ils ne connaissent même pas leur numéro d’immatriculation. Tu ne trouves pas que c’est un peu du vol ? ».

Supprimer la Caisse des Congés Spectacles ?

Il faut dire que l’image de la Caisse des Congés Spectacles a pris un sérieux coup depuis le fameux rapport de la Cour des Comptes. Pour mémoire, rappelons que le rapport en question, publié en 2008 était particulièrement féroce. On y apprenait entre autres joyeusetés que, parmi les bénéficiaires d’indemnités figuraient toujours des personnalités comme Bourvil, Joe Dassin ou Simone Signoret, tandis qu’une somme avait été débloquée pour faire taire un syndicaliste trop remuant.

Dans le même temps, toujours selon la Cour, 8% des indemnités dues n’avaient pas versées, soit un total de 16 millions d’euros par an, et que les délais de versement pouvaient atteindre sept mois. Bien entendu, la Caisse a immédiatement mis fin à des abus trop criants, mais le mal était fait. La Cour des comptes proposait même que l’indemnité compensatrice de congés payés soit payée directement par les employeurs, ce qui reviendrait à supprimer la Caisse des Congés Spectacles.

Supprimer les Congés Spectacles ? La Caisse a répondu que « la substitution d’une indemnité compensatrice de congés payés au versement du congé annuel par la Caisse compromettrait la possibilité qu’offre celle-ci aux artistes et techniciens du spectacle de prendre effectivement un congé annuel » et invoqué un jugement de la Cour de justice des Communautés européennes selon lequel des versements partiels étalés contreviendraient à la réglementation européenne. Ah bon ? Et comment cela se passe pour les intérimaires qui bénéficient d’un tel mécanisme ?

La Caisse des Congés Spectacles est aujourd’hui sous la tutelle du ministre du Travail. C’est donc ce dernier qui devrait décider d’une éventuelle suppression. En attendant, certains responsables de compagnies proposent déjà de boycotter la Caisse en versant une partie (10%) des cotisations sur un compte bloqué, le reste étant reversé aux salariés. Les jours de la Caisse des Congés Spectacles seraient-ils comptés ?